La crise humanitaire à Gaza atteint un point de non-retour, avec l’aide vitale systématiquement entravée. Lauren Ravon, directrice générale d’Oxfam Canada, a exprimé une frustration profonde et une colère face à cette situation, qualifiant l’incapacité d’acheminer l’aide de « plus que difficile, c’est enrageant ». L’organisation, habituée à opérer dans les contextes les plus complexes du monde, se voit ici interdite d’agir, laissant ses propres collègues et leurs familles au bord de la famine et dans la peur constante de ne pas survivre.
Une aide vitale refusée aux frontières
Alors que pendant un cessez-le-feu temporaire, Oxfam a pu distribuer de la nourriture, réparer les systèmes d’approvisionnement en eau et offrir un soutien psychologique, la situation s’est détériorée depuis le mois de mars. Aujourd’hui, tous les camions d’aide sont refusés à la frontière. Lauren Ravon révèle que 2,5 millions de dollars de produits alimentaires et sanitaires sont actuellement bloqués, à quelques mètres seulement des populations qui en ont désespérément besoin.
Oxfam Canada n’hésite pas à utiliser des termes forts pour décrire cette entrave. Le refus délibéré du gouvernement israélien de laisser passer l’aide est perçu comme une stratégie visant à affamer la population. « C’est délibéré. C’est pour affamer la population. », affirme Mme Ravon, ajoutant que « c’est un génocide » et que cette situation nécessite d’être dénoncée. De plus, elle qualifie la situation de « nettoyage ethnique », où une population entière est confinée à seulement 10 % du territoire de Gaza, privée de son droit d’y être.
Les parachutages : une solution inefficace et déshumanisante
Face au blocus terrestre, des parachutages de vivres ont été effectués, mais Oxfam Canada les juge inefficaces et dangereux. « Gaza, ce n’est pas une île déserte où il faudrait envoyer de l’aide par avion. », souligne Lauren Ravon. La bande de Gaza est accessible par la route, et de nombreux camions chargés d’aide sont prêts à intervenir. La tragédie des enfants tués en tentant d’attraper ces largages, parfois frappés par les colis, est « déshumanisante » et montre un traitement des êtres humains « pire que des animaux ».
L’appel pressant à la communauté internationale
Oxfam Canada lance un appel urgent à la communauté internationale pour faire pression sur les autorités et permettre l’acheminement de l’aide. Plusieurs actions clés sont nécessaires :
• Dire non à la privatisation et la militarisation de l’aide, citant en exemple le danger représenté par la Gaza Humanitarian Foundation.
• Travailler sans relâche pour un cessez-le-feu immédiat, car « il n’y aura pas d’amélioration de la situation humanitaire sans cessez-le-feu, c’est impossible. »
• Arrêter l’envoi d’armes à Israël, y compris celles produites au Canada qui « peuvent tuer des civils à Gaza. »
Le prix humain de l’horreur
Les témoignages des travailleurs humanitaires d’Oxfam sur le terrain sont déchirants. Leurs propres vies sont en danger, et ils sont contraints de vivre une « survie minimale » plutôt que de fournir une aide humanitaire normale. Une collègue d’Oxfam a raconté qu’un obus est tombé sur sa maison, un impact dans son lit, et que sa famille s’est retrouvée sous les débris, mais qu’il fallait continuer le lendemain. Elle décrit également des « flaques de sang partout » dans les rues où jouent les enfants, une réalité « infernale ».
Le plan d’évacuation forcée d’un million de personnes, affamées, faibles et traumatisées, représente une « catastrophe humanitaire sur catastrophe humanitaire », en plus d’être « absolument illégal ».
Les ONG face à des obstacles insurmontables
Au-delà du blocus de l’aide, les organisations non gouvernementales (ONG) rencontrent d’immenses difficultés à fonctionner. L’enregistrement est presque impossible, et des exigences vont « contre tous les principes humanitaires », comme la demande d’informations privées sur le personnel, mettant ainsi les vies en danger.
Malgré un sentiment d’impuissance, Lauren Ravon exprime une lueur d’espoir. Les Canadiens se sont mobilisés en grand nombre pour dire « c’est insupportable » et refuser que leur pays contribue à cette guerre, appelant à un cessez-le-feu et s’opposant à la vente d’armes. Elle constate que le gouvernement canadien « l’entend » et qu’un changement de position, incluant la reconnaissance de la Palestine, est perceptible. « Nos voix se font entendre, il faut parler plus fort », conclut-elle, insistant sur le pouvoir de la mobilisation citoyenne.
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