L’irrésistible projet du troisième temple de Jérusalem
Le débat sur les opérations israéliennes, qu’elles soient d’expansion ou non, divise profondément la société et la sphère politique actuelle. Pour comprendre la légitimité revendiquée par Israël dans ces actions, il est nécessaire d’examiner les fondements profonds du sionisme, qui reposent sur des bases religieuses et mystiques allant bien au-delà de l’aspect purement laïque.
L’ouvrage de Pierre Hillard, Histoire politique et mystique des temples de Jérusalem du roi David à Benjamin Netaniaou, explore le projet de construction du troisième temple, un objectif central pour certains courants du pouvoir sioniste actuel.
Les racines religieuses du pouvoir
Bien que la constitution de l’État d’Israël en 1948 soit souvent présentée comme laïque, elle contient une référence spirituelle fondamentale au « Rocher d’Israël », une expression dans la Torah pour évoquer Dieu. Le développement du sionisme, notamment sous l’impulsion du rabin Cook qui a institué le sionisme religieux (formé par un rabin héritier du mouvement Lubavitch), s’est accéléré de manière significative à partir de 1967.
La guerre des Six Jours en 1967, et la conquête de la Cisjordanie (Judée et Samarie) et de Jérusalem-Est, ont marqué une « poussée de fièvre » révélant une volonté immédiate de construire le troisième temple. Des destructions d’habitations, comme celles du quartier des Maghrébins, ont eu lieu, et des architectes furent consultés. Cependant, la présence de la mosquée Al-Aqsa sur le Mont du Temple (aujourd’hui l’Esplanade des Mosquées), reste l’obstacle principal. Bien que le territoire soit sous occupation israélienne, la Jordanie en détient la custodie religieuse.
L’empire Loubavitch et l’influence globale
Ce projet de construction est étroitement lié au puissant réseau des Loubavitch, un groupe orthodoxe religieux qui joue un rôle clé auprès du gouvernement israélien et au-delà. Les Loubavitch possèdent une diaspora et des moyens financiers colossaux, avec plus de 5 000 centres dans plus de 100 pays.
Des personnalités influentes, notamment le couple Sheldon et Myriam Adelson, ont joué un rôle déterminant dans le financement du projet. Sheldon Adelson (décédé en 2021) était un acteur clé des finances Lubavitch et a soutenu financièrement et politiquement Benjamin Netanyahou dès 1996. L’influence Lubavitch s’étend aux États-Unis, où elle finance des campagnes politiques, comme celle de Donald Trump, à qui Myriam Adelson a consacré des centaines de millions de dollars.
Cette mouvance a également établi des liens avec de grandes entreprises technologiques et financières (Goldman Sachs, Microsoft, Meta, BlackRock). Des alliances politiques et financières existent avec des acteurs majeurs de la surveillance et des logiciels, comme Alex Carp, le patron de Palantir, qui a reçu une haute distinction des Loubavitch en septembre 2025.
L’importance des Loubavitch pour le pouvoir israélien est illustrée par un accord conclu en 2022 entre le Likoud de Netanyahou et ces courants religieux, intégrant officiellement les Loubavitch à l’appareil politique et gouvernemental israélien.
Le sacrifice du « guerrier tragique » pour la mission finale
Les courants messianiques du sionisme religieux, qui animent des figures comme Netanyahou, estiment que leur mission est la reconstruction du temple et l’avènement du Machia’h.
Dans leur doctrine, des figures politiques comme Netanyahou ou même Trump sont appelées à endosser le rôle du Maschiach ben Joseph, ou le « guerrier tragique ». Ce personnage doit subir les épreuves et les souffrances, à l’instar du sacrifice du Christ, pour permettre l’arrivée du véritable Machia’h, le Maschiach ben David. Ce raisonnement messianique pourrait même impliquer le sacrifice d’une partie du peuple juif, perçu comme « l’offrande la plus délicate », en prélude à une guerre majeure.
Le troisième temple n’est pas une simple étape, mais l’objectif terminal. Sa construction, associée au retour du Machia’h et à la numérisation, est considérée comme le sommet de leur réussite. Le temple est le « golem messianique », censé assurer la victoire définitive d’Israël sur les nations, car, comme ils le disent, « le monde a été créé à partir de Sion ». Ce plan s’inscrit dans une logique de domination mondiale, où le système américain est d’ailleurs considéré comme une fondation d’essence rabbinique visant à favoriser cette construction
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