L’isolement total : netanyahu pris au piège de la justice internationale et de son propre peuple

La double peine : l’étau judiciaire se resserre sur Benjamin Netanyahu

Benjamin Netanyahu, l’homme qui s’est présenté pendant des décennies comme le protecteur indéfectible d’Israël, se retrouve aujourd’hui pris en étau entre deux tribunaux. D’un côté, la justice de son propre pays à Jérusalem le juge pour corruption, fraude et abus de confiance. De l’autre, l’ombre bien plus lourde de La Haye plane, où la Cour pénale internationale (CPI) exige qu’il réponde d’accusations de crime de guerre et de crimes contre l’humanité pour les actions menées à Gaza.

Le chef de gouvernement est poursuivi par la loi sur deux fronts à la fois, une situation qui pourrait bien signer son isolement total.

Le coup de semonce de la cpi et l’effet fugitif international

Le véritable point de bascule est survenu lorsque la CPI a rendu sa décision concernant les mandats d’arrêt visant Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la défense, Yoav Galant. Le recours déposé par Israël pour faire annuler ces mandats a été rejeté. La réponse des juges a été sans appel : il n’existe aucun fondement juridique pour annuler ces mandats, fermant ainsi toute échappatoire procédurale pour le premier ministre.

Le message envoyé par La Haye est brutal : aucune immunité personnelle ne protège un chef de gouvernement, même s’il dirige un allié historique de l’Occident. La Cour a également balayé l’argument central d’Israël affirmant que la CPI n’était pas compétente. La Cour rappelle un fait simple : la Palestine est membre officiel de l’institution depuis 2015. Juridiquement, cela suffit pour que la CPI revendique sa compétence sur tous les crimes présumés commis sur le territoire palestinien, incluant Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est.

Les accusations portées par le procureur Karim Khan sont d’une gravité extrême, incluant le ciblage intentionnel de civils, le meurtre et la persécution systématique, ainsi que l’utilisation de la faim comme arme de guerre. Selon le dossier, entre octobre 2023 et mai 2024, Israël aurait délibérément bloqué l’accès à la nourriture, à l’eau et à l’aide humanitaire vitale pour Gaza. Dans le langage juridique de la cour, la famine imposée à une population civile est considérée comme un outil de guerre, un crime.

Conséquences immédiates : le monde se referme

Les conséquences de cette décision de la CPI sont immenses. Dès cet instant, les 124 pays ayant ratifié le statut de Rome, c’est-à-dire la majorité du monde, ont l’obligation légale d’arrêter Benjamin Netanyahu et Yoav Galant s’ils posent le pied sur leur territoire. Le Premier ministre israélien ne peut plus voyager librement et est désormais perçu par beaucoup comme un fugitif international.

Cet isolement ne se limite plus aux chancelleries. Ses déplacements à l’étranger sont désormais calculés à la minute près, et ses itinéraires aériens sont planifiés pour éviter méticuleusement l’espace aérien de ces 124 pays tenus de l’arrêter. Lors de son dernier voyage vers les États-Unis, l’avion officiel a largement contourné la France et l’Espagne, allongeant délibérément le trajet pour éliminer tout risque d’atterrissage imprévu.

La pression diplomatique et la fissure occidentale

La menace judiciaire ne s’arrête pas à la CPI. En parallèle, un second front s’active devant la Cour internationale de justice (CIJ). L’Afrique du Sud maintient sa procédure pour génocide présumé à Gaza, insistant sur le fait qu’empêcher l’aide humanitaire et affamer une population civile n’est pas seulement un crime de guerre, mais, selon Prétoria, une violation grave de la convention de 1948 sur la prévention du génocide.

Cette pression, autrefois cantonnée au pays du sud global, commence à fissurer le bloc occidental. Si la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni se contentent encore de demander publiquement à Israël de respecter le droit international, l’Espagne va beaucoup plus loin. Madrid a annoncé le dépôt d’une plainte formelle après l’arraisonnement en haute mer par l’armée israélienne d’un convoi maritime d’aide. L’incident a mis le feu aux poudres diplomatiques, et l’écho se propage : la Norvège, l’Irlande et la Belgique annoncent à leur tour leur soutien à la plainte sud-africaine devant la CIJ. Ces pays soutiennent l’idée que les actes d’Israël à Gaza relèvent juridiquement de la convention sur le génocide.

L’isolement frappe également l’économie et la culture. L’Union européenne discute ouvertement de la suspension partielle de l’accord commercial qui donne à Israël un accès préférentiel au marché européen, et plusieurs pays européens menacent de boycotter le concours Eurovision si Israël y participe.

Face à cette bascule mondiale, Netanyahu tente de reprendre la main en imposant un nouveau récit : celui d’un Israël transformé en « Super Sparta », un état militarisé prêt à vivre seul contre tous sans dépendre du commerce international. Cette rhétorique assume l’isolement et le transforme en doctrine nationale.

Le piège intérieur : guerre, coalition et prison

L’isolement global n’est que la première phase de la crise. L’autre, peut-être plus dangereuse encore pour Netanyahu, vient de l’intérieur d’Israël. Le procès pour corruption, fraude et abus de confiance à Jérusalem continue inexorablement.

Le Premier ministre est désormais pris dans un piège politique parfait. D’un côté, ses alliés d’extrême droite qui garantissent la survie de sa coalition le poussent à l’escalade militaire permanente. Mais cette escalade est précisément ce qui alimente le dossier contre lui à La Haye. De l’autre, la pression de la rue israélienne ne faiblit pas. Les familles des otages exigent un accord, tandis que des centaines de milliers de manifestants réclament sa démission et de nouvelles élections. La société est fracturée et la confiance en son leadership rompue.

L’homme n’a plus de bonnes options. S’il arrête la guerre pour apaiser la communauté internationale, sa coalition d’extrême droite explose et il se retrouve seul face à ses juges à Jérusalem. S’il continue la guerre pour sauver sa coalition, il s’enfonce un peu plus dans son statut de paria international visé par la CPI.

L’homme qui a bâti toute sa carrière sur l’idée de sécurité est devenu le symbole de l’instabilité. La question finale n’est donc plus de savoir si Benjamin Netanyahu va chuter, mais de savoir qui le fera tomber en premier : la justice internationale ou son propre peuple.

Pas encore de commentaires.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.