Soldats israéliens à gaza : entre vidéos virales et crimes de guerre

Les réseaux sociaux sont devenus le théâtre d’un phénomène troublant dans le cadre du conflit à Gaza : des centaines de soldats israéliens se filment et se mettent en scène dans la zone de combat, principalement sur TikTok et Instagram. Ces vidéos, souvent utilisées pour humilier les Palestiniens, se moquer de leurs conditions de vie ou même documenter des exactions, soulèvent de sérieuses questions sur la conduite de l’armée israélienne, Tsahal, qui se revendique pourtant comme « l’armée la plus morale du monde ».

Le spectacle de la guerre sur les réseaux sociaux

Depuis l’entrée de l’armée israélienne dans la bande de Gaza, une multitude de vidéos ont émergé, montrant des soldats dans des situations diverses. Ces images, qui représentent probablement la partie émergée de l’iceberg de ce qui se passe sur le terrain, documentent des actes qui peuvent être considérés comme des crimes de guerre et témoignent d’un sentiment d’impunité chez certains militaires. Le discours officiel, relayé par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et certains médias, prétend qu’Israël n’aurait jamais enfreint le droit international ni les Conventions de Genève, vantant les valeurs de Tsahal telles que le respect de la dignité humaine et le professionnalisme.

Pourtant, cette affirmation est contredite par la réalité documentée : de nombreux crimes de guerre contre des civils ont été rapportés dès octobre et novembre 2023. Les vidéos elles-mêmes, qu’elles montrent des soldats faire des « blagues » dans les ruines ou se mettre en scène dans des lieux de combat et de mort, donnent l’impression que la guerre est un jeu. Cette indécence est d’autant plus choquante que, selon les Nations Unies, plus de 14 000 enfants ont été tués en seulement huit mois de bombardements et de combats, un bilan sans équivalent dans l’histoire récente.

Jeunesse et manque de professionnalisme au cœur des exactions

Le comportement des soldats dans ces vidéos révèle souvent une immaturité et un manque de professionnalisme. L’âge moyen des soldats dans une brigade d’active israélienne est d’environ 20 ans et 8 mois, bien plus jeune que dans une armée professionnelle comme l’armée française. Ce facteur est accentué par un manque d’encadrement professionnel au sein de Tsahal. Cette masse de jeunes soldats, couplée à des centaines de milliers de réservistes, peut mécaniquement entraîner une augmentation des exactions.

Des vidéos montrent des soldats tirant au fusil d’assaut sur des bâtiments pour s’amuser, sans objectif militaire clair ni phase de combat. On observe également du sexisme et de la violence envers les femmes palestiniennes, avec des images d’hommes posant à côté de sous-vêtements récupérés dans les décombres. L’armée, bien qu’ayant pris quelques sanctions, est critiquée pour leur mollesse, tandis que la diffusion de ces vidéos se poursuit.

La destruction systématique filmée sans vergogne

Depuis novembre 2023, les vidéos les plus partagées sont celles où des soldats israéliens font exploser des bâtiments ou des quartiers entiers et s’en réjouissent ouvertement. Cette absence de sécurité opérationnelle – à l’inverse de ce qui se passerait avec des forces françaises, où de telles images n’existeraient pas – amplifie l’impact stratégique de ces catastrophes. La bande de Gaza a subi des destructions massives : un rapport de l’ONU datant d’avril 2024 indique qu’environ 72 % des logements ont été détruits, laissant plus d’un million de Palestiniens sans abri.

Une enquête approfondie de l’ONG Bellingcat a révélé que de nombreuses explosions ne sont pas liées à des objectifs militaires, mais sont motivées par la vengeance. Certains militaires ont même avoué être devenus « accros » aux explosions. De telles destructions généralisées, rendant un lieu inhabitable, peuvent constituer un crime contre l’humanité et contribuent à un risque de génocide du point de vue juridique.

Traitements inhumains et violations des lois de la guerre

Au-delà des destructions, des images choquantes publiées dès décembre 2023 ont montré des traitements inhumains envers des prisonniers. Les lois de la guerre interdisent formellement de filmer des prisonniers et exigent qu’ils soient traités avec humanité, sans humiliation ni traitement dégradant. Pourtant, des vidéos documentent des actes de torture : des Palestiniens nus, les yeux bandés et les mains liées, battus, traînés au sol ou forcés de chanter sous la contrainte. Ces actions contreviennent directement aux Conventions de Genève, qui protègent l’intégrité corporelle des personnes contre les mutilations, traitements cruels, tortures et supplices. Il est souvent impossible de savoir si ces prisonniers sont des combattants du Hamas ou des civils, augmentant l’inquiétude quant à la portée de ces abus. D’autres vidéos ont montré un bulldozer écrasant un cadavre ou un soldat abattant une personne âgée, sourde et désarmée de 73 ans, avant d’être félicité par ses camarades.

Un contexte de haine et d’impunité

Ces comportements s’inscrivent dans un contexte post-7 octobre marqué par le traumatisme et une vision des Palestiniens souvent encouragée par des politiques comme Benjamin Netanyahou, qui parle d’« Amalek » pour désigner le mal absolu, assimilant ainsi les habitants de Gaza à des terroristes. Cette vision alimente un rejet de la souffrance palestinienne chez de nombreux Israéliens. La société israélienne, de plus en plus orientée vers la droite et l’extrême droite, propose aux Palestiniens la soumission, l’exil ou la mort. Cette tendance politique radicale, bien que rejetée par de nombreux Israéliens, influence le gouvernement actuel et, par extension, l’armée.

Ces actes inadmissibles et ignobles sont profondément contreproductifs d’un point de vue militaire et stratégique. Ils ne font qu’amplifier la haine et la colère, créant un cycle sans fin. La société israélienne, déjà très divisée avant le 7 octobre, se fracture davantage, et l’avenir de la région reste incertain face à de tels niveaux de haine et d’impunité. La documentation de ces vidéos est essentielle pour comprendre la gravité de la situation et les défis immenses qui attendent les populations des deux côtés.

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