La situation à Gaza a atteint un seuil alarmant, bien au-delà de la simple crise humanitaire pour s’inscrire dans une famine généralisée. Un témoignage poignant, recueilli par Le Monde sous la forme d’un message vocal, provient de Rami Aboujamous, un journaliste et habitant de l’enclave. Il y décrit une réalité quotidienne où la nourriture et l’eau sont devenues des denrées quasiment inaccessibles, exacerbée par des restrictions sévères sur l’aide humanitaire depuis quatre mois.
Ce qui est particulièrement frappant, c’est l’emploi d’une nouvelle tactique : l’arme de la famine. Depuis début mars, ses effets sont dévastateurs. On entend des enfants pleurer de faim dans les rues, et l’épuisement est palpable chez une population non seulement amaigrie mais aussi profondément atteinte psychologiquement. La faim n’est plus une simple privation ; elle est devenue un instrument de guerre qui ronge les esprits autant que les corps.
L’accès à la nourriture la plus élémentaire relève désormais de l’exploit. Un kilogramme de farine, base de la survie, coûte entre 140 et 150 shekels. Le paiement doit être effectué en espèces, ce qui ajoute une couche de difficulté : pour obtenir les 150 shekels nécessaires, il faut souvent transférer 300 shekels par virement bancaire à un bureau de change pour que sept personnes puissent s’en partager le montant. Cette quantité infime de farine permet de fabriquer à peine neuf à dix morceaux de pain. Mais même ce simple bout de pain, essentiel pour se sentir rassasié, est hors de portée pour de nombreux voisins et amis du journaliste. Il ne s’agit pas de luxe comme le poulet, les fruits ou la viande, mais de la pure survie face aux enfants qui crient famine.
La crise de l’eau est tout aussi critique. L’eau consommée est de l’eau douce, mais non potable. Les stations de désalinisation et de purification n’ont pas reçu les matières chimiques et les filtres nécessaires depuis près de deux ans, les rendant inopérantes. Chaque jour, les enfants et les familles font la queue, espérant obtenir de l’eau potable, mais les réserves sont dramatiquement insuffisantes pour tout le monde.
Gaza est devenue un véritable enfer, où les habitants meurent sous les bombardements constants, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, mais aussi et surtout par cette guerre de la faim qui pousse les gens à la folie. C’est une agonie lente et cruelle, qui se déroule sous les yeux du monde entier.
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