Quand la foi est attaquée, où sont les « défenseurs des chrétiens d’orient » ?
Imaginez : une église séculaire en flammes, un cimetière profané, des prêtres menacés et des villageois harcelés. Tout cela se déroule en Cisjordanie, et les agresseurs sont des colons israéliens. Pourtant, en France, là où certaines figures politiques se posent en fervents défenseurs des chrétiens d’orient, c’est un silence assourdissant qui règne. Pas un mot de Sarah Knafo, vice-présidente de l’intergroupe chrétien d’orient au Parlement européen. Éric Zemmour, Marine Le Pen, Jordan Bardella, ou encore Philippe de Villier, habituellement si prompts à dénoncer les persécutions chrétiennes, restent étrangement muets. Pourquoi ce silence lorsque les chrétiens ne sont pas attaqués par des musulmans ?
Taibé : un village martyr et un appel désespéré
Le village de Taibé, situé à l’est de Ramallah, est le dernier village entièrement chrétien de Cisjordanie, un lieu symbolique même mentionné dans l’Évangile selon Jean. Depuis des mois, ses habitants subissent un harcèlement constant et insoutenable. Des intrusions sur leurs terres, des plantations détruites, des tirs d’intimidation et, plus récemment, des incendies volontaires. Le dernier en date a visé l’église byzantine Saint-George, un édifice du 5e siècle qui a failli disparaître en fumée, les flammes atteignant également le cimetière. Ce sont les habitants eux-mêmes qui ont maîtrisé le sinistre avant l’arrivée des pompiers.
Face à cette escalade, les trois prêtres du village – orthodoxe, catholique et melkite – ont lancé un appel déchirant à la communauté internationale. Ils réclament une réaction urgente, une enquête indépendante sur ces actes, des pressions diplomatiques sur Israël et un soutien concret aux villageois pour qu’ils puissent demeurer sur leurs terres ancestrales. Jusqu’à présent, cet appel est resté sans réponse, tant sur le plan diplomatique que politique.
La colonisation agraire : une méthode silencieuse et dévastatrice
Les habitants de Taibé dénoncent une méthode bien connue des colons israéliens en Cisjordanie. Celle-ci consiste à arriver avec leurs troupeaux, les laisser paître sur des terres privées, puis déclarer que ces terres leur appartiennent désormais. C’est une forme de colonisation agraire lente et illégale, mais qui est trop souvent tolérée, voire ignorée, par les autorités israéliennes.
C’est précisément ici que le silence des figures politiques françaises devient profondément politique. Ceux qui se présentent comme les protecteurs des chrétiens d’orient sont étonnamment absents quand les oppresseurs sont des colons israéliens. Leur indignation semble s’éteindre quand la souffrance chrétienne ne sert pas un récit anti-musulman.
Un « nous » en péril à géométrie variable
Le terme « chrétien d’orient » est fréquemment utilisé dans les discours identitaires occidentaux pour incarner un « nous » en péril au milieu d’un « eux » menaçant. Cependant, la solidarité affichée ne semble exister que si l’ennemi désigné entre dans un récit préétabli. Depuis octobre dernier, les chrétiens de Palestine ont été frappés de plein fouet, avec 16 morts dans une église bombardée à Gaza, deux femmes tuées par un sniper, et des prêtres arméniens agressés à Jérusalem. Pourtant, le silence de ces mêmes personnalités françaises a été total.
Taibé est aujourd’hui seul, demandant simplement que ceux qui prétendent les défendre le fassent, même lorsque cela est politiquement inconfortable. La véritable défense des communautés vulnérables exige une cohérence et une moralité qui transcendent les opportunismes politiques.
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